2 métiers d’avenir sur les secteurs de l’artisanat : construire, rénover et décorer de façon écologique

Artisan du bâtiment en éco-construction

Marché de l’artisanat en éco-construction

Si l’éco-construction a longtemps été réservée à des activistes de l’écologie, la demande est désormais grandissante, et intéresse un public bien plus large. « On a plus de facilité qu’avant à trouver nos clients. On vend des maisons en ossature bois-paille à des gens qui sont intéressés par l’écologie, et qui veulent une maison performante.” indique Matthieu Beth, ancien apprenant, devenu formateur au Gabion, centre de formation en éco-construction

Une réelle prise de conscience s’est faite du côté des artisans également. Il poursuit : “ Je pense que de plus en plus d’artisans souhaitent effectuer leurs métiers de manière plus écologique. Lorsque l’on a commencé, nos concurrents posaient de la laine de roche. Aujourd’hui, ils essaient au moins de mettre de la laine de bois ». Richard Lagortiglia, fondateur de l’association Le Gabion indique que « Depuis deux ans, les demandes pour les formations ont explosé. Nous sommes même obligés de refuser des demandes. Le Covid y est pour beaucoup ».

Avec l’évolution des modes de construction, les méthodes sur le terrain doivent s’adapter. La théorie et les réglementations sont une chose, mais il faut ensuite pouvoir les appliquer sur le terrain. Aujourd’hui, les artisans sont formés à la pose d’agglos, d’isolant laine de verre et de peinture pétrochimique. Utiliser des matériaux biosourcés est indispensable, mais pour un bâtiment performant et durable, il faut qu’ils soient posés correctement. Or chaque matériau a ses propriétés techniques et modes d’application.

Se former à la restauration du patrimoine et à l’éco-construction

La Fédération Écoconstruire créée en 2008 dont Richard Lagortiglia est le co-président, propose des formations afin de permettre cette transition. Le but de la création de la fédération : regrouper les centres de formations professionnels à l’éco-construction (dont le Gabion). Ces formations proposées par la fédération sont particulières, car elles ne forment pas qu’à un seul métier, mais plutôt à l’approche du bâtiment. Les deux formations principales de la fédération sont celles d’Ouvrier professionnel en restauration du patrimoine et d’Ouvrier professionnel en éco-construction

La formation d’Ouvrier professionnel en restauration forme aux procédés de travaux de restauration ou de modification du bâti ancien, voire pour édifices classés, avec des matériaux sains et écologiques. Il abordent la charpente traditionnelle, la taille de pierre, le montage de murs en pierre, mais aussi l’isolation, le plâtre, les enduits terre ou chaux.

La formation d’Ouvrier professionnel en écoconstruction est tournée vers la mise en œuvre de matériaux biosourcés et géosourcés selon le principe de bioclimatisme. Il intègre lui aussi une volonté de sobriété énergétique.

Ce sont des métiers qui demandent, en revanche, une prédisposition au travail manuel. Matthieu Beth a suivi, il y a une quinzaine d’années, la formation d’ouvrier professionnel en restauration du patrimoine proposé par la fédération. Il raconte : « Ce qui m’a plu dans cette formation c’est le côté généraliste. On a une vision large du bâtiment. On balaye beaucoup de corps de métiers. On ne devient pas spécialiste, mais on a une vision globale des problèmes. Une formation qui conjugue parfaitement la théorie et la pratique ».

Un an après la formation, il crée son entreprise Éco2scop. À travers celle-ci, il propose la construction de maisons en bois et en paille, des rénovations de toitures, de l’isolation extérieure, mais aussi des charpentes, le tout avec des techniques écologiques, basées sur des matériaux sains, durables et respectueux de l’environnement. L’objectif de la démarche ? Garantir une performance thermique optimale.

Ces formations durent de 9 à 12 mois, avec plusieurs stages en entreprise. Elles ont un coût, mais peuvent être intégralement financées, par Pôle Emploi notamment.

Pour ceux qui préfèrent un format plus spécifique et en distanciel, Gautier de Faisons le mur propose des formations thématiques en ligne. Il a lui-même suivi une formation d’Ouvrier professionnel en éco-construction et transmet avec passion ses connaissances, aux professionnels comme aux particuliers. Outre ses fiches de recettes exhaustives sur les peintures écologiques et les enduits naturels, il propose une formation aux Enduits d’intérieur à la chaux, à La Peinture à la Caséine, et aux Solutions Anti-Humidité dans le Bâti Ancien.

Artisan d’art autrement

L’artisanat a le vent en poupe

Ça ne vous a sans doute pas échappé, ces dernières années, les métiers artisanaux ont la cote. En 2018, le livre Nouveaux Artisans dressait le portrait d’une génération qui bouscule les codes. Des néo-artisans en quête de sens, de métiers manuels, ancrés dans le réel, a contrario des métiers qu’ils avaient généralement occupés précédemment. Cet engouement s’est également trouvé du côté des consommateurs. Tant et si bien que de grandes marques de décoration ont imité un “style artisanal” fabriqué à l’autre bout du monde pour commercialiser des pièces à bas prix. Dans un monde dans lequel nous avons oublié le vrai prix des choses, cette concurrence rencontre un réel succès, au détriment des artisans locaux. Le grand public ne comprend pas leurs prix pourtant justes. De nombreux artisans se sont prononcés sur les réseaux sociaux, tentant de mettre en garde les rêveurs, concernant les réalités quotidiennes de leur métier : il reste difficile de gagner sa vie en tant qu’artisan en France. Il est alors indispensable de se différencier, de réaffirmer haut et fort ses valeurs, voire d’imaginer d’autres façon complémentaires d’exercer son métier.

Devenir artisan engagé

De plus en plus d’artisans questionnent aujourd’hui leurs façons de faire et les matières premières utilisées. Ce n’est pas parce que c’est fabriqué artisanalement, que c’est écologique, et nombreux sont ceux qui prennent ce chemin. C’est le choix qu’ont fait Antoine et Manon Pluriel, en créant leur activité d’ébénistes : La fabrique Pluriel. “Nous voulions avant tout, que nos gestes n’aient pas d’impact sur l’environnement ». Tous les deux très sensibles à l’environnement depuis leur plus jeune âge, ils font le choix de ne travailler que du bois massif, et local. La région qu’ils habitent héberge de nombreuses forêts qui abritent du chêne, du châtaignier, ou encore du hêtre. Leur fournisseur se situe à seulement 4 kilomètres de chez eux. Les deux ébénistes amoureux du bois, font aussi attention à la quantité qu’ils prélèvent dans la nature :  ils prennent uniquement ce dont ils ont besoin, dans une démarche de ne pas consommer « trop ». Les huiles qu’ils utilisent sont naturelles et certifiées « Écolabel », garanties sans COV. Leurs déchets tels que les copeaux et les sciures, eux, prennent place au potager. Les chutes de bois sont transformées en petits objets ou en énergie calorifique grâce à leur chaudière dernière génération. Tout est optimisé afin de ne pas gaspiller, et produire au mieux un objet respectueux de l’environnement et sain pour l’humain. Le couple va même jusqu’à refuser des commandes si celles-ci les obligent à faillir à leurs valeurs. Aujourd’hui, cet engagement est récompensé. Ils viennent de se voir attribuer par la Chambre des Métiers le label « Artisan éco-responsable », un label encore régional.

À ce jour, il n’existe pas de formation spécifique, et le sujet de l’écologie n’est que très peu abordé. Manon recommande de s’informer, se documenter, sur la permaculture, l’éco-conception… pour questionner naturellement ses façons de faire. 

On ne peut que recommander d’effectuer des stages chez des artisans engagés, et de rencontrer d’autres artisans pour partager ses bonnes pratiques, mutualiser ses déchets, trouver des solutions ensemble.

Ré-inventer le métier d’artisan

Cette génération de néo-artisans a dû faire face et explorer de nouvelles façons de vivre de leur art. Certains explorent leur créativité et dépassent l’utilitaire pour proposer des œuvres d’exception comme Léa Munsch. La frontière entre artisanat et art s’efface alors. L’artiste Margaux Derhy propose un nouveau système appelé Le Cercle qui permet à un artiste de proposer à un acheteur d’acquérir une de ses œuvres contre une rémunération mensuelle sur un an.

Qu’ils soient céramistes, ébénistes, restaurateurs d’anciens meubles… ils ont pour certains imaginé de nouvelles façons de propager leurs savoir-faire. L’envie de faire soi-même, et de se reconnecter à la matière, pour ceux qui passent de nombreuses heures derrière un ordinateur, est aujourd’hui une réalité. La majorité des artisans donnent aujourd’hui des cours. WeCanDoo référence des artisans qui proposent des ateliers thématiques dans plusieurs villes de France. En quelques clics, on peut réserver un atelier dans notre région pour réaliser soi-même un bol, un bouquet de fleurs, un meuble, un bijou… Pour l’artisan, c’est un gain de temps en termes de communication et de gestion. D’autres lieux hybrides tel que Clay Atelier à Paris accueillent des cours de céramique, et louent un morceau d’atelier à l’heure, aux néo-potiers amateurs passionnés comme professionnels.

Là encore, pas de formation spécifique, si ce n’est se tourner vers des cours ou des accompagnements en marketing et communication engagés. Intégrer un réseau, rencontrer d’autres personnes de secteurs différents, créer du lien, générer des idées. Et toujours, nourrir sa curiosité.

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