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Mobilier en bioplastique : vraiment écologique ?

Le bioplastique pourrait-il constituer une alternative au plastique devenu omniprésent ? Nous vivons dans un monde entouré de plastique : les objets du quotidien, les emballages, les pièces techniques… sont aujourd’hui largement fabriqués en plastique, matériau issu du pétrole. Et nous le savons tous cette industrie pétrochimique pollue à tous les stades : de l’extraction des matières premières à sa destruction en passant par sa fabrication. Le plastique est très long à se décomposer (en moyenne 405 ans). Malgré les dispositifs de gestion des déchets en place dans les pays les plus développés, 13 millions de tonnes de plastique sont rejetées chaque année dans les océans. La production mondiale de matière plastique a atteint un niveau record de 359 millions de tonnes en 2018. Ce chiffre a augmenté de 3,2% depuis 2017. Les filières de valorisation des déchets sont en développement mais aujourd’hui, le taux de recyclage du plastique en Europe n’est que de 30%. Et le recyclage d’un plastique est loin d’être infini. Il faut aussi souvent réinjecter du plastique neuf pour fabriquer une nouvelle bouteille plastique par exemple, dans un procédé consommant aussi beaucoup d’énergie.  On retrouve de plus en plus de bioplastiques comme les sacs biodégradables dans la vie quotidienne. Désormais, c’est aussi dans le mobilier et les objets de décoration que les bioplastiques font leur apparition.

Qu'est-ce qu'un bioplastique ?

Le terme bioplastique regroupe en fait deux catégories de matériaux :

  • Les plastiques bio-sourcés : non plus obtenus à partir de ressources fossiles, mais à partir de ressources renouvelables (canne à sucre, amidon de maïs ou de pomme de terre…).
  • Les plastiques biodégradables : qui comme leur nom l’indique ont la propriété de se dégrader. Un bio-plastique est biofragmentable.

Un bio-plastique n’est pas forcément biodégradable et vice-versa.

Les véritables attributs «verts» des bioplastiques résident principalement dans leur production, pas nécessairement dans l’ensemble de leur cycle de vie.

Plastique bio-sourcé : vraiment écolo ?

Les plastiques bio-sourcés sont d’origine végétale : ils sont généralement fabriqués à partir de matières premières végétales telles que l’amidon de maïs au lieu de l’huile de pétrole et sont renouvelables.

Cependant, une étude menée à l’Université de Pittsburgh démontre  que, même si les bioplastiques réduisent l’empreinte carbone pendant la production, ils introduisaient de plus grandes quantités d’autres pollutions telles que les pesticides et les engrais dans l’environnement. Les matières peuvent aussi être cultivées en utilisant des OGM pour augmenter les rendements. Certaines cultures comme celle du maïs sont très gourmandes en eau.  Il existe des végétaux plus intéressants comme le chanvre qui après une transformation, permet d’obtenir un celluloïd résistant, dense, facilement modulable et léger. Il est peu couteux à produire, pousse rapidement et stocke une quantité de CO2 importante (plus que le lin ou le coton). Ces culture nécessitent néanmoins une utilisation extensive des terres au détriment de la forêt ou de production de produits alimentaires.

Des recherches et développement sont en cours pour développer des produits à l’aide d’algues ou par des bactéries ne monopolisant par les sols. Par exemple les designers hollandais Eric Klarenbeek et Maartje Dros, ont développé un plastique d’algue et travaillé (avec l’atelier LUMA, à Arles) à la fabrication d’objets quotidiens.

On notera que la réglementation n’impose que 30% minimum en provenance de la biomasse, le reste pouvant être issu du pétrole.

De plus, la fabrication d’un plastique (polymères) nécessite d’assembler des briques chimiques élémentaires (monomères). La cellulose végétale et les autres sources de monomère végétal sont composées d’une multitude de variétés de monomères inutilisables. Séparer les monomères utiles requière d’utiliser des solvants, procédé couteux et polluant. De plus, les solvants utilisés durant la fabrication et jetés ensuite se révèlent un gros frein à l’industrialisation des bioplastiques.

Et du côté des bioplastiques biodégradables ?

Étant donné qu’il n’existe pas de texte juridique encadrant le terme « biodégradable », il n’est pas facile de s’y retrouver. La dégradation d’un plastique est différentes de la dégradation naturelle, la bio-dégradation.

La bio-dégradation a lieu en 2 phases :

1/ D’abord, la bio-fragmentation qui correspond à la réduction du matériau en morceaux par l’action de l’eau, de la lumière ou des insectes, des vers de terre;

2/ Ensuite, la bio-digestion par des micro-organisme (les bactéries)  dégageant du CO2, du méthane, de l’eau et des résidus non toxiques. C’est ce dégagement qui différencie une bio-dégradation d’une fragmentation. Un plastique biodégradable est oxo-fragmentable : lors de sa dégradation il va se fragmenter en microparticules (invisibles à l’oeil nu) sous l’effet de la lumière mais il ne sera pas assimilé par les micro-organismes. Ainsi, ces microparticules persistent dans l’environnement et se retrouvent dans la chaîne alimentaire.

Biodégradable ne veut pas nécessairement dire compostable.

Certains plastiques sont dits compostables mais cela signifie qu’ils doivent être compostés dans des conditions spécifiques.  Il s’agit de compostage industriel nécessitant des stations de compostage équipées permettant de créer les conditions de T et humidité, de concentration de bactéries, de retournement du compost etc… Il n’existe pas de station en France…. (attention à l’empreinte carbone).

Quelques exemples de bioplastique

  • Le PEF (polyéthylène furanoate) est obtenu à partir de sucre de betterave ou de canne. Il possède des caractéristiques physiques égales ou supérieures au PET, notamment de meilleures propriétés barrières vis-à-vis de l’oxygène, du dioxyde de carbone et de l’eau.
  • Le PLA (Acide poly lactique) est un polymère biodégradable en compostage industriel. Il est largement utilisé pour l’impression 3D personnelle. Ce polyester industriellement commercialisé, est produit à partir de ressources renouvelables comme le maïs, la betterave sucrière ou la canne à sucre.
  • La famille des PHAs (polyhydroxyalcanoate) : Ces polyesters d’origine bactérienne sont produits à partir de microorganismes par fermentations de co-produits. Ces matériaux sont biosourcés, compostables domestiquement et aussi biodégradables en milieu marin. Les PHA constituent une famille regroupant plusieurs polymères présentant ainsi des propriétés finales différentes.
  • Le PBS (polybutylene succinate). le PBS était, il y a quelques années, issu de ressources fossiles, mais grâce aux avancées biotechnologiques, il est désormais issu de ressources renouvelables. C’est un matériau biodégradable et compostable domestiquement comme le PHA.
  • Le PEF (polyéthylène furanoate). Le PEF est issu à 100% de ressources renouvelables et est intégralement recyclable. Toujours au stade pilote, ce nouveau matériau devrait arriver sur le marché pour 2023.
  • Très récemment, Lucy Hughes, une jeune étudiante britannique a créé un bioplastique capable de se décomposer en seulement six semaines. Fait à partir de déchets de la pêche (écailles de poissons, algues…), il ne relâche aucune toxine lors de sa décomposition. Plus solide qu’un sac en plastique standard, il peut être utilisé pour de nombreux emballages. Récompensée par le prix James Dyson UK 2019.  @lucyhughesdesign

Les plastiques dans la décoration

Présentée par Alki et conçue par le designer Jean Louis Iratzoki, la chaise Kuskoa Bi est la première chaise en bioplastique. Elle propose une forme enveloppante, simple et confortable.
Kartell a lancé la collection de Componibili est conçue bioplastique Bio-On (PHA). Ce bioplastique est issu de matières premières renouvelables (déchets végétaux) qui, avec l’adjonction de micro-organismes, forment une matière similaire au plastique. Il est présenté comme entièrement (100%) biodégradables de façon naturelle.
L’utilisation du PLA en impression 3D laisse aussi libre court à des conception d’objets déco ou du quotidien. Plusieurs marques et designers se prêtent au jeu, notamment La double clique si contre, mais aussi le duo de Minimum Design avec des vases et des cache-pots.

La marque Zuiver travaille également à de nouvelles propositions : un bioplastique à base d’herbe à éléphant est actuellement en cours de développement pour une gamme de mobilier conçue en collaboration avec APE Studio, basé à Amsterdam. Le plastique est biodégradable et peut être éliminé dans une installation de compostage industriel. Zuiver travaille également sur un bioplastique fabriqué à partir d’algues. Une collaboration avec Studio Klarenbeek & Dros, un studio de design néerlandais primé qui se concentre sur la recherche écotechnologique et collaborative. Les algues sont transformées en biopolymères afin de fabriquer un matériau biosourcé et entièrement compostable à la maison.

Fin de vie des meubles en bioplastique

Les initiatives sont nombreuses mais attention :
  • L’indication «entièrement compostable» utilisée parfois sans précision pourrait conduire les gens à jeter des produits bioplastiques directement dans l’environnement, croyant à tort qu’ils se décomposeraient naturellement.
  • Le prix élevé et le manque de filières de tri et de solutions de recyclage et compostage expliquent pourquoi ces biomatériaux sont encore peu présents sur le marché du plastique aujourd’hui.
  • Les circuits de collecte pour acheminer les produits compostables industriellement sont peu développés. La plupart des bioplastiques sont éliminés dans des bacs ordinaires et se retrouveront inévitablement dans les décharges ou les incinérateurs. Par exemple, Le PLA n’est pas trié. Il est dans la catégorie 7 (autres), non trié et recyclé.

Sources : (1) Les jolis chaises en résine bio par Marjan van Aubel et James Shaw pour Transnatural Label sur eporta / (2) et (3) sont des verres et bols en bioplastique d’algue réalisés par et empruntés à Dezeen / Textes inspirés par les posts Instagram de @m.mme.recyclage et d’autres lectures / Quelles sont les alternatives aux plastiques issus du pétrole ? / The End of Life Environmental Impact of BioplasticsThe Truth about Bioplastics / Le plastique végétal, une révolution ?

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